Le temps de l’Afrique se lit dans l’histoire des espaces de vie des africains. Or l’histoire de l’urbanisation des villes africaines est enchevêtrée de plusieurs facteurs. A l’occupation clanique, tribale, voire « ethnique » de l’espace, s’est progressivement ajoutée l’occupation économique par les contraintes du commerce, l’occupation administrative par les réquisitions étatiques pour les routes et bâtiments publics, l’occupation volontariste des nouveaux citoyens épris de cosmopolitisme, l’occupation opportune des exilés africains en quête de ré-immersion sociale, l’occupation informelle du grand nombre sous la pression de l’exode rural et de la prolétarisation massive des banlieues de villes, etc. Les quartiers ou communes des villes africaines n’ont donc pas la même forme architecturale, la même composition de populations, les mêmes besoins et désirs, les mêmes arts de vivre, les mêmes traditions sociales, économiques ou politiques. (Pr Franklin Nyamsi)

Editorial


Pour une nouvelle philosophie 
de l’action humanitaire:*
De la compassion à la réciprocité*

Véritable lieu de concentration de toutes les activités humaines, la ville est par excellence un lieu privilégié, à la fois de transformation et d'altération, issues des interactions diverses. Celle-ci sont souvent sources de conflits entre les habitudes communautaires et les exigences d'une culture urbaine moderne. L’incompétence et le choix des mauvaises stratégies de gestions de nos cités pour mener à bien cette mutation sont l’une des sources des crises urbaines contemporaines car beaucoup de mouvements sociaux actuels sont issus des zones urbaines. Faut-il comprendre par là que ces conflits sont le résultat d'un malaise issu de : 
1)-Mouvances de nouvelles pratiques sociales; 
2)-Processus de changement de la perception ou de la vision du monde par des enfants et des jeunes?
Ces approches nous amène à nous appesantir sur la réflexion de l’humanisme et les nouvelles pratiques sociales face à la situation de décadence de la solidarité dont l’Afrique est le berceau. Dans ce sens, plusieurs problématiques s’affrontent pour mettre en exergue ces phénomènes ; mais en même temps les stratégies pour corriger en vue de réguler la société sont multiformes et variées :
-      Le développement durable à travers l'un de ses trois piliers (Le social): point de mire des sociétés en développement ou pour tout dire, des sociétés en mutation, ensuite,
-      Les droits humains à travers les multiples excès judiciaires dont les Hommes sont victimes à savoir les discriminations, les exclusions, les ségrégations et les stigmatisations tous azimuts, enfin,
-      L’humanitaire à travers l’action philanthropique donc la morale en fait partie. Mais, en résumant tous nos propos par l’humanitaire, nous arrivons facilement à trouver une stratégie juste dans l’action solidaire qui est le point d’achoppement de notre présente philosophie.
L’action humanitaire est aujourd’hui paradoxale. Prétendant "défendre tout individu, à tout moment et à tout endroit de la planète", elle peut s’entendre comme l’aboutissement de la lutte pour les droits de l’homme. Mais, en même temps, elle pervertit le combat pour les droits de l’homme en ceci qu’elle se propose, de fait, comme un substitut à l’action (du)politique.
L’action humanitaire prend son essor dans un contexte particulier : celui d’une crise de confiance plus générale vis-à-vis du politique et en même temps de crise des solidarités. La méfiance à l’égard du politique est pour une part à rapprocher de la défiance à l’égard des Etats, au moment d’ailleurs où les social-démocraties et l’Etat-providence sont eux-mêmes mis en question. La crise des solidarités, elle, apparaît tandis que la montée des exclusions et des discriminations à "l’intérieur" de la société et l’élargissement du fossé entre le Nord et le Sud à l’"extérieur" sollicitent des interventions humanitaires. Faut-il pour autant parler de repli (individualiste, nationaliste...)? En fait, il y a un décalage énorme entre le sentiment de vivre à un niveau mondial, l’accélération de l’internationalisation du monde, et la nécessité pour l’individu de s’inscrire dans le cadre d’une collectivité qui le rassure. Dans ce contexte propice aux contradictions, l’action humanitaire est elle-même porteuse d’ambiguïtés ou d’ambivalence. Ainsi par exemple le principe émergeant selon lequel "il n’y a pas de revendication juridique égalitaire que partagée par l’ensemble de la "terre-patrie" (Edgard Morin) peut conférer à l’action humanitaire une portée éthique. Et à l’approche en terme de Droit se juxtapose une approche en terme de devoir, l’individu étant "responsable de tous les autres hommes". Il ne s’agit pas seulement de la "forme décadente de la mauvaise conscience", mais aussi ou surtout de l’apparition de la revendication de dignité. Une telle démarche pourrait être à la fois politique, dépassant l’individualisme, et a-politique, parce qu’elle prétendrait refuser le politique et toute médiation du politique. En même temps, ces démarches humanitaires interviennent dans des situations de dénonciation des exactions de l’appareil d’Etat.
Mais l’action humanitaire préfère "le soulagement ponctuel d’une détresse à l’attente messianique d’un salut total". Pour Pierre Hassner, pour qui Etat de droit, respect des droits des individus, souveraineté populaire, sont indissociables de la démocratie, la revendication "égalitaire" induite par l’action humanitaire ne peut se satisfaire de réponses évacuant le politique, sans quoi "la défense des victimes accroit de façon irrésistible le décalage entre ces dernières et ceux qui veulent les prendre en charge". L’humanitaire n’a de sens qu’en sortant les victimes de leur statut de victime, en créant les conditions d’une reconnaissance mutuelle et d’une réciprocité, et un cadre national et international susceptible de transformer la victime en égal, au sein d’une communauté mondiale.

*Le titre et une partie du texte est de 
http://base.d-p-h.info/fr/fiches/premierdph/fiche-premierdph-1525.html)

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